Personnel – Pourquoi je voyage seule ?

Quand je dis que je pars en voyage, que ce soit pour des vacances ou un week-end, inévitablement, la première question qui tombe, c’est “tu pars avec qui ?”. Cette question ne me surprend même plus, la majorité des gens a l’air de penser que quand on part quelque part, ce ne peut être forcément qu’avec quelqu’un. Du coup, quand je réponds “avec personne, je pars seule”, je me prépare à faire face à des réactions variées, mais très souvent teintées d’incompréhension.

Il y a ceux qui ne conçoivent pas qu’on puisse voyager seul. Il y a ceux qui comprennent un peu, mais qui, je cite, m’admirent parce qu’eux n’auraient pas le courage de le faire. Et il y a ceux qui, comme moi, le comprennent parfaitement. De cette catégorie-là, je n’en ai pas rencontré beaucoup, je crois.

La décoration d’un restaurant à Los Angeles

Comme tout être humain, j’ai besoin de contact humain de temps en temps ; aller à des afterworks, manger avec des amis, passer un après-midi à jouer à des jeux de société, voir un film au cinéma… J’aime passer du temps avec mes amis et ma famille, évidemment. Mais j’aime aussi me retrouver seule – j’irais même dire que c’est un besoin viscéral. Je sature rapidement du contact humain, du bruit, de l’agitation. Je ne peux pas déconnecter de tout ça facilement, puisque la journée je travaille, je vois donc des gens à longueur de temps, et le soir quand je rentre ou le week-end, si je n’ai rien de prévu avec mes amis, il y a ma famille (comme je suis toujours chez mes parents). Du coup, quand je pars en vacances… Je choisis d’y aller seule dans 90 % des cas pour me retrouver seule avec moi-même. Pour faire ce que je veux, comme je veux, quand je veux, sans devoir composer avec les envies de quelqu’un d’autre. Faire les choses comme je l’entend, égoïstement, sans devoir me prendre la tête avec quelqu’un parce que ce quelqu’un veut faire la grasse matinée, ou n’est pas intéressé parce que j’ai prévu, ou n’a pas envie de manger les mêmes choses que moi, ou n’a pas les mêmes moyens que moi… Globalement, c’est ma raison principale de voyager seule ; ça, et le fait que j’ai besoin de me retrouver seule, de n’avoir que le minimum d’interactions nécessaires avec les gens qui m’entourent.

Alors, certes, quand je voyage seule, je ne me fais pas de souvenirs avec des gens ; “pourtant c’est mieux” semblant être l’argument principal de ceux qui ne comprennent pas. Mais, ce qu’ils ne comprennent justement pas, c’est que pour moi, ces souvenirs ne sont pas nécessairement meilleurs avec des gens ; ils peuvent l’être, mais peuvent ne pas l’être aussi ; et les souvenirs que je me fais seule peuvent être meilleurs… Ou non. Pour avoir déjà vécu tous les cas de figure, c’est assez variable. Ça dépend de mon humeur du moment, des gens qui m’accompagnent, de leur propre humeur, des activités prévues, de mon état de fatigue, etc. Variable, donc, comme je l’ai dit. Du coup, ce n’est pas une de mes raisons de partir seule ; mais ce n’est pas non plus un argument en faveur de voyages avec des amis, pas pour moi.

Vue sur Big Ben à Londres

J’apprécie tout de même partir avec des amis, hein, ne vous faites pas d’idées. Mais à petite dose, et de temps en temps. Et surtout, pour ça, j’ai besoin de me préparer psychologiquement au moment même où je commence à penser à mon voyage. Par conséquent, si j’ai prévu un voyage seule et que quelqu’un essaye de s’y rajouter… À une époque je disais oui, ça ne s’est pas toujours bien passé, je regrettais d’avoir accepté… Maintenant je dis non sans regrets. Parce que j’ai besoin de prendre du temps pour moi et parce que psychologiquement, je ne suis pas prête. Ça peut faire rire, cette formulation, mais ça n’en reste pas moins vrai. Je précise, quand même, que quand ça arrive, ce n’est pas vous qui êtes en cause, et ce n’est pas parce que je ne vous aime pas 😉 aussi, ce n’est pas à prendre mal !

Parfois, aussi, je peux dire non même si le voyage est même pas encore prévu. Ça peut être parce que j’arrive à un point où j’ai besoin d’être seule avec moi-même, ça peut être une incompatibilité de personnalité – j’ai la mienne, et je sais que ça ne colle pas avec celles de certains de mes amis, que j’adore voir, mais avec qui ça s’envenimerait assez rapidement si on devait être h24 ensemble pour plus de deux-trois jours… Ça peut aussi être le programme, parfois, qui ne me convient pas : rester une semaine à glander au bord d’une piscine ou de la plage les doigts de pied en éventail, non merci, ce n’est pas pour moi. Je n’aime pas rester inactive quand je voyage, je m’ennuie assez rapidement, je préfère visiter, prendre des photos, marcher jusqu’à ne plus sentir mes pieds…

Et même préparée psychologiquement, j’ai besoin que ça ne dure pas trop longtemps ; sinon, encore une fois, je sature du contact humain, de ne pas retrouver un environnement familier, de ne pas retrouver mes habitudes… Généralement c’est une semaine maximum, et même là, ça peut être trop.

En toute honnêteté, tout ça est très probablement lié à l’anxiété sociale que j’ai longtemps eue. Je ne parle pas d’anxiété sociale à la légère ; à une époque, pas si lointaine que ça, rien qu’à l’idée d’appeler le médecin pour prendre rendez-vous, je me pliais en deux tellement j’en avais mal au ventre + nausées, et il fallait que je me répète un nombre incalculable de fois ce que j’allais dire au téléphone, penser aux différentes réponses qui pourraient m’être faites, quoi répondre en conséquence… Je ne sais pas si vous l’avez vécu, mais je peux vous dire que ça vous bouffe la vie. Parce que ce n’était pas que pour appeler le médecin ; c’était aussi pour aller acheter du pain, aller à la Poste envoyer quelque chose, régler mes achats en caisse, effectuer un exposé devant la classe, passer une soutenance de stage, etc. Bref, pour tout, dans la vie de tous les jours. Aujourd’hui j’en ris, les gens en rient aussi quand j’en parle, parce qu’à me voir maintenant on ne l’imaginerait sans doute pas… Mais à l’époque c’était angoissant à un niveau dont vous n’avez sans doute pas idée.

Vue depuis le Rialto à Venise

Heureusement, j’ai été forcée de travailler dessus et de sortir de ma zone de confort ; d’abord quand j’ai commencé à bosser dans un magasin de fringues pour enfants en 2009-2010, puis avec la quantité d’oraux notés que j’ai eu à passer, que ce soit à la fac ou à l’école… J’ai appris à mieux gérer mes angoisses et mon stress, et aujourd’hui, depuis deux, trois ans, ça va beaucoup mieux ; mais j’en conserve encore quelques traces : je n’aime toujours pas parler au téléphone, je vais l’éviter si je peux parce que là aussi, je dois être préparée psychologiquement ; j’ai toujours un petit pincement au ventre avant une présentation, mais le niveau de douleur n’a plus rien à voir ; je n’aime toujours pas les situations imprévisibles, j’ai besoin d’un minimum d’organisation et de savoir comment ça va se passer, mais je surmonte ces situations sans souci ; et surtout, j’ai besoin de me retrouver seule de temps à autres, de faire le point avec moi-même, pour respirer, évacuer le stress, les frustrations, l’angoisse.

Voyager seule est donc un excellent moyen et un besoin viscéral, pour moi, de désaturer, de prendre du temps pour moi, pour me remettre d’aplomb, de reconstruire mon bouclier émotionnel, de recharger mes batteries – bref la liste est longue – tout en me faisant de nouveaux souvenirs et en visitant de nouveaux lieux. Et c’est pour les mêmes raisons que je conserve, ça et là dans l’année, des soirées et des week-ends où je ne prévois rien et pour lesquels je refuse tout ce qu’on me propose.

Enfin, pour terminer ce post – qui s’est révélé être un peu plus personnel que ce que je n’en avais l’intention au début – je dirais que voyager seul est à la portée de tous ; si je peux le faire, sachant que je ne suis pas spécialement courageuse ou forte ou quoique ce soit d’autre, n’importe qui peut le faire, pour peu que vous ayez un niveau correct d’anglais et un minimum de débrouillardise. En revanche, tout le monde n’en a pas la nécessité, je pense même qu’il existe des catégories de personnes qui sont incapables de voyager seuls, non pas parce qu’ils manquent de débrouillardise ou autre, mais simplement parce qu’ils ont un besoin constant de partager ces moments avec des gens… À vous de voir dans quelle catégorie vous vous situez !

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